En première ligne, les élus locaux en charge des services publics de l’eau sur l’ensemble du territoire hexagonal et ultramarin, réunis au sein de la FNCCR et de France eau publique, alertent sur la situation critique de l’eau potable en France. Après la parution du dernier rapport des inspections ministérielles Prévenir et maîtriser les risques liés à la présence de pesticides et de leurs métabolites dans l’eau destinée à la consommation humaine *, ils réitèrent leur demande d’actions à très court terme de l’État pour endiguer la pollution massive des zones de captages d’eau.
Les communes ou leurs groupements sont responsables de la distribution de l’eau potable, et par conséquent de la qualité de l’eau. Ces collectivités gèrent près de 33 000 captages et manquent cruellement de moyens et de soutien pour en assurer la protection, alors que 12 500 ont été fermés depuis 1980 en grande partie en raison de la dégradation de la qualité de la ressource ou de l’impossibilité d’en assurer la protection. Si rien n’est fait, combiné aux effets du dérèglement climatiques sur la disponibilité des ressources en eau, la pérennité du service public d’eau potable est menacée.
10 millions de Français ont consommé une eau non conforme -heureusement sans danger imminent- en 2022, et le dernier rapport de l’IGAS/IGEDD/ CGAAER rendu public fin novembre 2024 « *Prévenir et maîtriser les risques liés à la présence de pesticides et de leurs métabolites dans l’eau destinée à la consommation humaine » indique que :
- Environ 4 millions de personnes sont affectées par des dépassements critiques pour les métabolites de la chloridazone (DPC, MDPC). La présence des métabolites de l’atrazine concerne plusieurs centaines de milliers d’usagers.
- Les valeurs indicatives des métabolites « non-pertinents » tels le métolachlore ESA ou chlorothalonil R471811, sont souvent largement dépassées.
- Plus alarmant encore, les concentrations de certains métabolites dépassent désormais les limites de qualité dans les eaux brutes de 2 g/l (jusqu’à 23,28 µg/l dans l’Aisne)
- Parmi les 40 départements les plus touchés par des pollutions: L’Aisne, la Marne, l’Oise, la Seine-Maritime, le Calvados, Pas-de-Calais, l’Aube, la Somme, la Nièvre, l’Eure, Ardennes, Aude, de l’Hérault, du Gard, du Tarn, les Alpes de Haute-Provence, la Charente-Maritime, les Deux-Sèvres et la Vienne.
- Plus généralement, le rapport pointe à son tour l’échec patent de la politique nationale de préservation des captages même s’il souligne quelques réussites locales.
Danielle Mametz, Vice-présidente de la FNCCR et du SIDEN-SIAN ajoute que « les « polluants éternels » (PFAS), quelles que soient leurs origines agricole, industrielle ou domestique, constituent également une menace particulièrement inquiétante, non seulement vis-à-vis des molécules faisant désormais l’objet de limites de qualité que de celles non encore évaluées tels le TFA ».
Quel que soit le mode de gestion (DSP ou régie) choisi par les 560 collectivités adhérentes à la FNCCR et à France eau publique, les élus, maires, présidents, vice-présidents de communautés, de métropoles, de syndicats de communes ou mixtes, en charge du service public de l’eau renouvellent leur demande* d’actions (cf liste des signataires L’eau potable en péril : il est temps d’agir | FNCCR texte tribune collective 29 mai 2024) auprès du gouvernement face à cette dégradation qui s’accélère et se généralise :
- Sanctuariser les aires d’alimentation de captages avec l’engagement d’une trajectoire d’arrêt de l’utilisation des pesticides et engrais minéraux de synthèse dans les aires d’alimentation de captages et activer les leviers réglementaires aux mains des préfets.
- Appliquer le principe « responsable-payeur » pour que les industries concernées prennent en charge les coûts de dépollution. Ce principe doit être réaffirmé par l’augmentation de la redevance pour pollutions diffuses sur les produits phytopharmaceutiques et son élargissement aux micropolluants, ainsi qu’aux médicaments et cosmétiques comme cela est d’ailleurs prévu par la future Directive Eaux résiduaires urbaines.
- Décupler l’accompagnement technique et financier à la transition agroécologique pour réduire l’usage des pesticides en mobilisant les aides de la PAC dans le cadre de la révision toute proche du Plan stratégique national à mi-parcours.
- Soutenir les collectivités face au mur d’investissement nécessaire au respect des limites de qualité de l’eau.
La mise en place de mesures curatives, telles que le traitement de l’eau ou l’abandon d’un captage, représente un coût 5 à 10 fois plus élevé pour les usagers des services publics d’eau que la mise en place de mesures préventives de reconquête de la qualité de l’eau.
Hervé Paul, Vice-président de la FNCCR et de la métropole Nice Côte d’Azur, conclue « après les assises de l’eau (2019), le varenne agricole de l’eau (2022) et le plan eau (2023), la conférence nationale sur l’eau prévue en décembre 2024 doit être l’occasion de passer à l’acte pour la protection des ressources en eau ».
Accéder à l’intégralité des propositions approuvées sous forme de motions lors du congrès national de la FNCCR, juin 2024 : https://www.fnccr.asso.fr/article/liste-des-diverses-motions-adoptees/
« Le temps est à l’action pour sécuriser le principe de l’eau potable au robinet pour tous », le Monde 29 mai 2024 : https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/05/29/le-temps-est-a-l-action-pour-securiser-le-principe-de-l-eau-potable-au-robinet-pour-tous_6236128_3232.html
Accéder à l’appel collectif lancé en mai 2024 (liste des signataires et appel : L’eau potable en péril : il est temps d’agir | FNCCR)
Accéder au rapport IGAS IGEDD CGAAER, juin 2024, rendu public novembre 2024 : https://igas.gouv.fr/prevenir-et-maitriser-les-risques-lies-la-presence-de-pesticides-et-de-leurs-metabolites-dans-leau-destinee-la-consommation-humaine
Contact presse FNCCR : Sandrine GUIRADO, s.guirado@fnccr.asso.fr, 06 86 79 42 92
Contact France Eau Publique : Nicolas PUJOS, fep@fnccr.asso.fr, 06 23 62 39 89